Présidents de la République d'Irlande
     
     
     
 
1938 - 1945
 
     

Dr DOUGLAS HYDE

Né en 1860 - mort en 1949

Il est des hommes qui entretiennent une relation privilégiée avec le terroir où ils sont nés. Tel est bien le cas de Douglas Hyde. Ce fils d’un pasteur anglican, natif du comté de Roscommon en Irlande, fut essentiellement un homme enraciné. Son père se chargea de son éducation. Les longues randonnées à travers la campagne irlandaise et la fréquentation assidue de villageois au rocailleux parler gaélique firent le reste. En 1880, le jeune Hyde entra à l’université de Dublin où il se distingua sans jamais parvenir à s’intégrer totalement. Irlandais autant qu’on pouvait l’être, il supportait difficilement les préjugés coloniaux de Trinity College, le mépris dans lequel on y tenait la vieille langue ancestrale et les coutumes populaires, et le zèle avec lequel on s’efforçait de singer le mode de vie anglais jusque dans ses aspects les plus discutables. Soucieux de lutter contre ce courant d’imitation servile, Douglas Hyde avait adhéré à la Société pour la préservation de la langue irlandaise et participé au lancement du Gaelic Journal. Il avait également publié un recueil de contes où s’exprimait toute la richesse de la tradition orale irlandaise en voie d’extinction. Après un bref séjour au Canada, Douglas Hyde devait se consacrer entièrement au mouvement de renaissance linguistique. Ses Chants d’amour du Connaught publiés en 1893 eurent une profonde influence sur la jeune génération. William Butler Yeats, John Millington Synge, Lady Gregory y puisèrent une bonne part de leur inspiration. Mais Hyde n’était pas seulement un intellectuel, il était aussi un homme d’action. En 1893 il fonda une nouvelle association culturelle, la Ligue gaélique. Son but : préserver et étendre l’usage de la langue irlandaise, remettre en honneur les vieilles coutumes, développer une industrie nationale, refaire en un mot une Irlande irlandaise ouverte à toutes les traditions, catholique et protestante, nationaliste et unioniste, pourvu qu’elles fussent authentiquement irlandaises. Le succès foudroyant de la Ligue gaélique — 964 « branches » en 1906 dans tout le pays — fit espérer une véritable révolution culturelle. Hyde parvint à imposer l’enseignement de l’irlandais à l’école et à l’université. Mais le mouvement qu’il avait déclenché ne devait pas tarder à lui échapper. La Ligue gaélique tomba sous la coupe du Sinn Fein et des nationalistes les plus avancés. En 1915 elle se déclara favorable à une « Irlande libre ». Faute de pouvoir maintenir la ligne apolitique qui lui semblait la seule de nature à pouvoir unir le peuple d’Irlande, Douglas Hyde abandonna ses fonctions de président pour se consacrer à la littérature et à l’enseignement. Mais il n’avait pas peu contribué à galvaniser la génération de la guerre d’indépendance. Et lorsque naquit l’État libre d’Irlande, c’est tout naturellement qu’il entra au Sénat sans renoncer pour autant à sa chaire d’irlandais moderne à l’Université nationale. Enfin, lorsque Eamon De Valera fit promulguer la nouvelle Constitution de l’Eire en 1937, Douglas Hyde quoique protestant fut élu premier président du nouvel État. L’Irlande rendait ainsi hommage à un des véritables pères de la nation .
Après qu’il eut consciencieusement rempli son mandat, de 1937 à 1945, le gouvernement irlandais mit à sa disposition une résidence où il s’éteignit, le 12 juillet 1949, entouré de l’affection et du respect de ses concitoyens.

     
 
1945 - 1959
 
     

SEAN TOMAS O'CEALLAIGH

Né en 1882 - mort en 1966

     
 
1959 - 1973
 
     

EAMON de VELERA

Né en 1882 - mort en 1975

Premier ministre (1932-1948, 1951-1954 et 1957-1959), puis président de la république d'Irlande de 1959 à 1973, qui apparaît comme l'une des grandes figures du nationalisme irlandais.
De Valera naquit le 14 octobre 1882 à New York et sortit diplômé du Blackrock College de Dublin. D'abord étudiant puis professeur de mathématiques en Irlande, il fut bientôt connu comme activiste indépendant. Rallié au parti nationaliste Sinn Féin, il participa activement à la rébellion de Pâques de 1916 et fut condamné à la réclusion à perpétuité lorsque les Britanniques matèrent la révolte. Libéré dans le cadre de l'amnistie générale de 1917, il fut élu président du Sinn Féin la même année, lorsque les membres républicains irlandais du Parlement britannique démissionnèrent pour former leur propre gouvernement.
De nouveau arrêté par les Britanniques en mai 1918, il réussit à s'évader (février 1919) avec l'aide d'un groupe de militants du Sinn Féin. Réfugié aux États-Unis, il rassembla plus de 5 millions de dollars en soutien au mouvement révolutionnaire, et devint le président d'un gouvernement irlandais en exil. En 1921, il accepta de négocier le sort de son pays avec le Premier ministre britannique LLoyd George, mais refusa finalement le traité qui créait un État libre d'Irlande doté du statut de dominion et amputé de l'Ulster. Lorsque le Dáil Éireaann (le Parlement irlandais) ratifia avec la Grande-Bretagne le traité, De Valera, qui le dénonçait comme un compromis humiliant, démissionna de la présidence du gouvernement. Devant cette opposition, le gouvernement de l'État libre d'Irlande, officiellement reconnu par ce même traité, l'emprisonna en 1923. Libéré après onze mois, il reprit la tête du Sinn Féin, qui ne participa pas au Dáil avant 1927. Cette année-là, il créa le Fianna Fáil, une faction dissidente du Sinn Féin, opposée au traité et partisane de la lutte armée. Il put alors profiter de la crise de succession du roi George V pour faire voter une Constitution en 1937, consacrant la naissance de la République irlandaise.
Il put alors revenir sur le devant de la scène politique irlandaise. Il occupa le poste de président du Conseil exécutif de l'État libre d'Irlande de 1932 à 1937 et de Premier ministre de la République irlandaise sous la nouvelle Constitution de 1937. En 1932, il devint président du conseil de la Société des Nations et, en 1938, président de l'Assemblée de cette organisation. En Irlande, sa politique fut constamment marquée par un nationalisme et un isolationnisme, tant politiques qu'économiques. En 1938, il approuva la politique d'apaisement du Premier ministre britannique Neville Chamberlain. Pendant la Seconde Guerre mondiale, il défendit avec succès une politique de neutralité de l'Irlande. Débouté de son poste en 1948, il l'occupa de nouveau à deux reprises avant d'être élu président de la République en 1959, puis en 1966. Il se retira de la vie politique en 1973 et mourut en 1975.

     
 
1973 - 1974
 
     

ERSKINE CHILDERS

Né en 1905 - mort en 1974

Porté à la présidence de la république d’Irlande le 1er juin 1973 par 52 % des voix, Erskine Childers est un protestant d’origine anglaise. Cette singularité surprend moins quand on sait que, sur les quatre présidents que la République irlandaise a eus depuis sa proclamation (en 1937), on compte deux protestants ; le premier, toutefois, Douglas Hyde, avait été désigné et non élu. D’autre part, le père d’Erskine Childers est un héros de la guerre d’indépendance ; officier britannique, il s’engagea très tôt aux côtés des rebelles irlandais et fit partie des irréductibles qui refusèrent, avec Eamon de Valera, le traité de partage de l’île signé en 1921 avec l’Angleterre. Arrêté comme rebelle, il devait être fusillé sur les ordres du premier gouvernement irlandais libre, soucieux de rétablir la paix.
Erskine Childers, qui fait donc partie des 5 p. 100 de citoyens irlandais de confession protestante, est né en Grande-Bretagne et a fait ses études à Cambridge. Très marqué par des épreuves familiales, c’est un homme simple et discret, fin et cultivé. Jeune, il suit les traces de son père en militant dans le parti Fianna Fail fondé en 1926 par E. de Valera. Il aura été quatre fois ministre au cours de vingt-huit années de vie politique. Il détient le portefeuille de la Santé et le poste de vice-Premier ministre dans le gouvernement de Jack Lynch lorsque celui-ci est battu aux élections anticipées de janvier 1973. La défaite de son parti, au pouvoir depuis seize ans, n’empêche pas les électeurs de voter pour E. Childers lorsque, six mois plus tard, il se présente aux élections présidentielles.
S’il doit assumer la lourde succession d’E. de Valera, le « chef historique » de la guerre d’indépendance, président de la République depuis 1959, sa grande popularité, sa chaleur et son humour (qui font merveille à la télévision) lui assurent d’emblée la confiance de ses concitoyens.
L’élection d’un protestant à la tête de la république d’Irlande survient à un moment crucial de l’histoire de l’île. Le thème de la « réconciliation » a d’ailleurs joué un rôle capital dans la campagne électorale de Childers qui, député de la ville de Monaghan, à la frontière de l’Irlande du Nord, connaît mieux que personne les déchirements que cette situation provoque dans les familles. Son élection a sans doute rassuré ses coreligionnaires du Nord, toujours prompts à voir dans la république voisine un État inféodé à Rome. Le nouveau président suscita sans doute pendant son mandat une évolution décisive des relations entre Dublin, Belfast et Londres. Bien qu’il ait peu de pouvoirs constitutionnels, il fera tout pour favoriser les liens nouveaux qui se tissent, graduellement, entre les trois capitales.

     
 
1974 - 1976
 
     

CEARBHALL O'DALAIGH

Né en 1911 - 1978

     
 
1976 - 1990
 
     

PATRICK HILLERY

Né en 1923

     
 
1990 - 1997
 
     
     

MARY ROBINSON

Né en 1942

Haut-commissaire des Nations unies aux droits de l’homme de 1997 à 2002.Née à Ballina, dans le comté de Mayo, Mary Robinson fait des études de droit, à Trinity College, à Dublin, puis à l’université Harvard, aux États-Unis. Revenue à Dublin, elle mène de front une carrière d’avocate et de professeur d’université. En 1969, elle est élue au Sénat, comme représentante de Trinity College.
Dès le début des années 1970, elle fait campagne pour les libertés civiques ; elle défend le droit des femmes à siéger dans un jury, à être imposées indépendamment de leur mari et à recevoir elles-mêmes le paiement des allocations sociales ; elle milite en faveur de la dépénalisation de l’homosexualité et des droits des enfants naturels. En 1976, elle rejoint le Parti travailliste, mais échoue par deux fois dans sa candidature de député au Dáil, lors des élections générales de 1977 et de 1981. Elle quitte le Parti travailliste en 1985 parce qu’il soutient, au sein de la coalition gouvernementale, un accord anglo-irlandais, qui, selon elle, ne reconnaît pas les droits des unionistes de l’Irlande du Nord.
En 1990, Mary Robinson se présente comme candidate de la gauche à l’élection présidentielle de la république d’Irlande ; étant donné sa réputation de radicale et le statut minoritaire des partis de gauche en Irlande, sa victoire est une surprise. Elle est en outre la première femme à accéder à la présidence de la république d’Irlande ; c’est également la première fois qu’un candidat n’appartenant pas à l’un des deux grands partis du pays, Fianna Fáil et Fine Gael, est élu. Dans son discours inaugural, elle déclare : « L’Irlande que je représenterai est une Irlande nouvelle, ouverte, tolérante et globale. » Elle prend des mesures en faveur des plus défavorisés et des associations féminines. Elle s’attache à réduire les divisions de la société irlandaise, notamment sur la question de l’Ulster. Après avoir rencontré Gerry Adams, le président du Sinn Féin, elle dialogue également avec les unionistes d’Irlande du Nord.
À l’intérieur, sa présidence reflète l’accélération du passage, en Irlande, d’une politique fondée sur des valeurs gaéliques, catholiques et conservatrices, vers celle d’un État pluraliste, séculier et moderne, en gestation depuis les années 1960.
En politique étrangère, Mary Robinson attire l’attention internationale sur la gravité de la situation en Somalie et au Rwanda, où elle est le premier chef d’État à se rendre après la crise de 1992 et à la suite du génocide de 1994. Aux Nations unies, elle soulève la question de la pauvreté en Afrique. Cet engagement de longue date en faveur des droits de l’homme la conduit ensuite à défendre cette cause directement au cœur de l’Organisation des Nations unies (ONU).
Après avoir su donner à la fonction présidentielle un rôle et une influence qu’elle n’avait jamais eus auparavant, Mary Robinson quitte la tête de l’État irlandais et est nommée, en septembre 1997, par le Secrétaire général des Nations unies, Kofi Annan, haut-commissaire des Nations unies aux droits de l’homme. Là encore, elle parvient à donner à sa fonction un rayonnement inédit. Mais elle doit renoncer à assumer un second mandat, face à l’opposition des États-Unis et de la Russie, à l’égard desquels elle n’a pas ménagé ses critiques. À l’inverse, les organisations non gouvernementales (ONG) de défense des droits de l’homme saluent le bilan de Mary Robinson, dont ils ont maintes fois apprécié les prises de position fermes. En septembre 2002, le Brésilien Sergio Vieira de Mello, qui apparaît plus diplomate et pragmatique, succède à Mary Robinson.

     
 
1997 -
 
     

MARY McALEESE

Né en 1951

     
     
Irlande